La Première ministre, Élisabeth Borne, a présenté le 10 janvier, les grandes lignes de la future réforme des retraites. Le projet de loi correspondant sera présenté en conseil des ministres le 23 janvier 2023 pour une entrée en vigueur de la réforme au 1er septembre 2023.
Selon le Conseil d’orientation sur les retraites, le déficit du régime de retraite par répartition devrait atteindre 13,5 milliards d’euros en 2030. Avec cette réforme, le gouvernement entend amener ce régime à l’équilibre d’ici 7 ans.
À savoir : pour financer cette réforme, les taux des cotisations vieillesse augmenteraient de 0,1 point. Cependant, en contrepartie, le gouvernement diminuerait les cotisations dues au titre du régime des accidents du travail et maladies professionnelles.
Un âge légal de départ à la retraite à 64 ans
L’âge légal de départ à la retraite, actuellement fixé à 62 ans, serait progressivement porté à 64 ans. Ainsi, à compter du 1er septembre 2023, il augmenterait de 3 mois par année de naissance pour atteindre 63 ans et 3 mois en 2027, puis 64 ans en 2030. Une mesure qui concernerait tous les actifs : salariés, travailleurs indépendants et fonctionnaires.
La durée de cotisations pour avoir droit à une retraite à taux plein serait de 43 ans (soit 172 trimestres) en 2027. Une durée de cotisations qui, selon la précédente réforme des retraites, devait s’appliquer en 2035 seulement.
L’âge de départ à la retraite à taux plein resterait, lui, fixé à 67 ans. À cet âge, les personnes bénéficient d’une pension de retraite sans décote même si elles n’ont pas validé le nombre de trimestres requis.
Précision : les aidants familiaux pourraient valider des trimestres de retraite. En outre, les stages dit de « travaux d’utilité collective » (Tuc), en vigueur dans les années 80, seraient pris en compte dans le nombre de trimestres exigés pour partir à la retraite.
Une retraite à 85 % du Smic
Les personnes partant à la retraite à compter du 1er septembre 2023 verraient leur pension minimale augmenter de 100 € par mois.
Par ailleurs, lors de leur départ en retraite, les salariés et les travailleurs indépendants percevraient une pension de retraite égale à 85 % du Smic net pour une carrière complète au niveau du Smic, soit environ 1 200 € brut par mois (Smic 2023). Cette pension minimale serait ensuite indexée sur l’inflation.
Cette mesure bénéficierait également, dès cette année, aux retraités actuels. Ceci permettrait, selon le gouvernement, de revaloriser 2 millions de « petites retraites ».
Le dispositif carrières longues revisité
La retraite anticipée pour les carrières longues permet aux personnes qui ont commencé à travailler tôt de partir à la retraite avant l’âge légal.
La réforme des retraites prévoit un départ à la retraite :
– à 58 ans pour les personnes ayant démarré leur carrière avant 16 ans ;
– à 60 ans pour les personnes ayant démarré leur carrière avant 18 ans ;
– 2 ans avant l’âge légal (soit 62 ans en 2030) pour les personnes ayant démarré leur carrière avant 20 ans.
Pour avoir droit à ce dispositif, les personnes devraient avoir validé la durée de cotisations exigée plus une année. Une durée fixée, en 2027, à 176 trimestres (43 ans plus un an).
À savoir : les congés parentaux d’éducation seraient désormais pris en compte pour bénéficier du dispositif carrières longues (jusqu’à 4 trimestres validés).
Le départ anticipé en retraite maintenu
Dans le cadre de la retraite anticipée, l’âge légal de départ à taux plein resterait fixé à 62 ans. Seraient concernés les personnes percevant une pension d’invalidité et les bénéficiaires d’un départ en retraite pour inaptitude.
En outre, pourraient prendre leur retraite 2 ans avant l’âge légal de départ :
– les victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelle ayant entraîné une incapacité d’au moins 10 % si cette incapacité est liée à une exposition à des facteurs de pénibilité (une condition de durée d’exposition de 5 ans serait exigée, contre 17 ans actuellement) ;
– les victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelle dont l’incapacité est supérieure à 20 %.
À noter : les personnes reconnues comme travailleurs handicapés pourraient toujours partir en retraite à 55 ans, sous réserve d’avoir cotisé un nombre minimal de trimestres.
La prise en compte de la pénibilité
Depuis 2017, le compte professionnel de prévention (C2P) permet aux travailleurs exposés à certains facteurs de pénibilité de cumuler des points échangeables contre le financement d’une formation, un passage à temps partiel sans perte de salaire ou un départ anticipé en retraite. Pour acquérir des points, le salarié doit avoir été exposé à ces facteurs au-delà de seuils déterminés par décret.
La réforme prévoit d’abaisser les seuils de certains facteurs de risques. Ainsi, par exemple, le seuil de travail de nuit passerait de 120 à 100 nuits par an et celui du travail en équipes successives alternantes de 50 à 30 nuits par an.
En outre, le C2P permettrait aux salariés d’effectuer une reconversion professionnelle. Ainsi, les salariés ayant acquis 60 points sur leur compte pourraient bénéficier d’une formation longue et qualifiante d’une valeur de 30 000 €.
Par ailleurs, il serait créé un fonds d’un milliard d’euros pour la prévention de la pénibilité. Un fonds destiné notamment à prévenir les maladies professionnelles causées par le port de charges lourdes, les postures pénibles et les vibrations mécaniques. Et les salariés exerçant ces métiers bénéficieraient d’un suivi médical renforcé.
Des mesures en faveur de l’emploi des seniors
Seules 33 % des personnes âgées de 60 à 64 ans sont en emploi en France actuellement, contre près de 61 % en Allemagne et de 70 % en Suède. Aussi, le gouvernement entend prendre différentes mesures pour maintenir les seniors dans l’emploi.
La retraite progressive, qui permet de liquider une partie de sa pension de retraite avant l’âge légal et de travailler à temps partiel, serait ouverte à tous les travailleurs indépendants. Quant au cumul emploi retraite, il permettrait de créer des droits supplémentaires à la retraite.
À savoir : le gouvernement souhaite entamer une discussion avec les partenaires sociaux pour instaurer un compte épargne-temps universel sur lesquels les salariés pourraient mettre de côté leurs RTT ou jours de congés non pris.
Enfin, « pour valoriser les bonnes pratiques et identifier les mauvaises », un « index seniors » serait créé dans les entreprises : il serait obligatoire dès 2023 pour les entreprises de plus de 1 000 salariés et en 2024 pour celles de plus de 300. Et l’emploi des seniors deviendrait un thème obligatoire de la négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels.
Et les régimes spéciaux ?
Le gouvernement a annoncé la fermeture des régimes spéciaux de retraite de la RATP, des industries électriques et gazières, des clercs et employés de notaire, du Conseil économique social et environnemental et de la Banque de France. Ainsi, les salariés embauchés dans ces entreprises à compter du 1er septembre 2023 seraient affiliés au régime général des retraites. En outre, le décalage de 2 ans de l’âge légal de départ à la retraite s’appliquerait aux salariés actuels des régimes spéciaux en tenant compte de leurs spécificités.
À noter : les régimes spécifiques des professions libérales et des avocats ne seront pas concernés par cette fermeture.